L’œuvre d’Alain Ferreira Fernandes révèle un regard acerbe et critique mais aussi interrogateur sur notre civilisation et l’évolution de Cuba dans ces dernières décennies. Ses thèmes d’inspiration abordent avec une certaine brutalité esthétique les références plastiques de la culture occidentale et américaine, dénonçant une certaine violence du capitalisme et la difficulté identitaire d’un pays hispanique aux marges de cette civilisation.
Avec une touche très expressionniste, ses toiles proposent un choc esthétique par l’intensité de l’expression. Ses compositions mélangent une iconographie nourrie des influences plastiques de la publicité et de la culture hollywoodienne (ou californienne) pour mettre en relief les contradictions observées dans son propre pays.
Abordant des sujets graves, comme la crise migratoire, économique, sociale et politique qui décime la population cubaine, l’artiste met en scène les tourments de son pays et les questionnements de la jeunesse cubaine sur son avenir et son identité. En 2022, l’île a ainsi vu sa population décroître de près de 500.000 personnes sur un total de 11,5 millions d’habitants, sur fond de la plus grave crise économique connue par le pays, inflation, coupures de courant, d’eau, pénurie de médicaments, nourriture, … sans oublier le sujet récurent de l’insécurité de la population face au pouvoir politique, la hausse de la délinquance et de la criminalité… « Entre débrouille au quotidien et chemin de l’exil… ».
Alain est un témoin visuel du chaos qui bouleverse son pays depuis la Révolution de 1959. Il s’institue comme un « traducteur » des affres et des dilemmes culturels auxquels fait face la population cubaine dans ses errances sociales et politiques.
Les œuvres présentées ici font partie d’une série « révolution » réalisée entre 2019 et 2022 à Trinidad. L’artiste y reprend le thème de l’exil et de la confrontation à l’altérité pour nous faire réfléchir – grâce à une esthétique légère – au sens du départ et à la gravité des choix de vie de ses concitoyens.
La touche est rapide et la matière brute laissant apparaître des silhouettes américanisées portant casquette et lunettes de soleil évocatrices d’un univers cinématographique, perdues dans un univers chaotique et foisonnant de référents divers. Les hélices et ailes d’avion, les personnages ramant dans une mer déchaînée et les inscriptions Scape, Free Border, Exit ne laissent aucun doute sur la teneur du message. L’artiste reflète ici l’absurdité des dilemmes de la population cubaine que les difficultés économiques forcent à réfléchir à l’avenir. Les titres des œuvres (« Over Land », « Free Border », « Land Scape », « Cuba Loca »…) témoignent également de ce souhait de transcrire en alphabet artistique la confusion des repères culturels et artistiques que connaît son pays aujourd’hui.
La palette utilisée reste pourtant haute en couleur et joyeuse. Elle permet à ses tableaux de nous faire partager le regard mitigé de l’artiste sur son pays, à la fois empreint d’une énergie vitale débordante et attiré par un irrémédiable engrenage économique vers la pauvreté et le sous-développement. Alain s’impose comme un « journaliste des cœurs » nous livrant ici une clef de lecture des émois et émotions contradictoires des cubains devant le choix impossible entre l’exil et l’amour du pays.
Pour ces toiles sur coton ou lin intitulées « Over Land », « Free Border », « Land Scape », « Cuba Loca », « Champion The Match », « Full Star », « Anejo Especial », « Convertible All Star », « Stop Secret », « Rojo Inside », l’artiste a utilisé une technique mixte (« mixed media ») à base de peinture à l’huile et acrylique, gels médium épais, pâtes de structure appliquées à la spatule et au couteau, bombes acryliques, bombes de vernis mats, crayons noirs, craies, pochoirs, sur des supports grands formats.
Ce sont ces toiles singulières qui vous sont présentées aujourd’hui en France, sur châssis à clés en sapin et caisse américaine en tilleul naturel de la Maison Marin à Arcueil.
La “Living Gallery Berlin” expose également certaines des œuvres d’Alain Ferreira Fernandes, lesquelles ont fait l’objet d’un évènement « Cuba Special » lors de la foire « Discovery Art Fair 2022» à Cologne en Allemagne, du 28 avril au 1er mai 2022.
Quelques toiles d’Alain Ferreira Fernandes sont actuellement exposées à Paris à la galerie Brazil Modernist située au Marché Paul Bert-Serpette aux Puces de Saint-Ouen, Allée 2, n.137 – (Tél : 06 60 15 68 02).